lundi 15 février 2010

Louis Pergaud vs George Orwell

En 2007, le candidat Nicolas Sarkozy promettait qu’on allait voir ce qu’on allait voir. Une majorité de Français l’a crû, surtout lorsqu’il se vantait des brillants résultats obtenus lors de son passage au Ministère de l’Intérieur… Qu’importe qu’ils fussent exagérés ou carrément faux, sa parole était magique. Médiatiquement magique, grâce aux JT de TF1 et aux Une de Paris-Match.

On se demande alors pourquoi aujourd’hui le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux annonce un énième “plan contre la délinquance” qu’il défendra à partir de mardi après-midi à l’Assemblée, soit une loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité (dite “LOPPSI 2”).

Pourquoi “un plan de plus” ? Ou alors pourquoi “seulement maintenant” ? Rappelons que cela fait tout de même plus de huit ans, à quelques mois près, que Nicolas Sarkozy est en charge de la sécurité des Français : comme Ministre de l’intérieur entre 2002 et 2004, puis entre 2005 et 2007, enfin en tant que Président de la république depuis cette date.

Un énième plan à cause de la réalité, peut-être ? Les “atteintes volontaires à l’intégrité physique” (coups et blessures, homicides…) ont augmenté de 14 % entre 2003 et 2008, soit une progression de 54499 délits, selon le rapport annuel de l’Observatoire National de la Délinquance… Dégradation de la sécurité confirmée par l’INSEE pour le compte de l’INHES-OND, qui estime “à près de 850 000 le nombre de victimes d’actes de violences physiques hors ménages et hors vols en 2008” contre “736 000 en 2006”, soit une croissance de 11,5 %.

Par ailleurs, dans le même temps, l’image du service public s’est fortement dégradée dans l’opinion.

Gaël Sliman, directeur général adjoint de l’Institut Paul Delouvrier-BVA conclut après la très forte baisse (- 16 %) de l’indice de “satisfaction” des Français concernant la police et la gendarmerie, qu’“insuffisamment efficaces avec les délinquants et toujours aussi peu courtois avec les citoyens, les policiers doivent faire attention à ne pas se couper de la population qui garde pour le moment une bonne image de l’uniforme.”
Le dernier fait-divers en date de trois adolescentes embarquées au poste pour y être mise en garde à vue – dont l’une, en pyjama-jogging, au saut du lit – suite à une bagarre à la sortie de leur collège, illustre parfaitement cette amère constatation.
S’agissait-il d’une tentative de meurtre ? De racket ? De traffic ? Non, d’une simple dispute de cour d’école, finalisée par l’échange d’un coup de pied et d’un coup de poing. Conséquence pour la “victime” : une journée d’interruption de travail (ITTP), c’est-à-dire la constatation probable d’un bleu et d’un terrible traumatisme psychologique que personne avant elle n’a, à l’évidence, jamais connu lorsqu’il usait ses fonds de culotte sur les bancs de l’école. Ou si quelqu’un l’a connu avant elle, il n’y a probablement pas survécu.

Selon le vieil adage populaire “qu’il n’y a pas de fumée sans feu”, il est évident pour nombre de nos concitoyens que toute personne interpellée par la police l’est rarement par erreur. Et si le cas de ces adolescentes nécessitait qu’elles soient placées en garde-à-vue, c’est qu’elles le méritaient bien.

Il faut être dangereux psychopathe comme Louis Pergaud pour n’y voir qu’une éternelle “guerre de boutons”(1) qui a rendu cet auteur si célèbre.
Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux ont, à l’évidence, préféré lire George Orwell(2). Avec gourmandise.

VoxNR.com

Aucun commentaire: