mercredi 23 mars 2011

Il y a dix ans...


Je me rappelle encore de cette matinée du 10 mars 2001. Il était 4h30 et je reçus un coup de téléphone m’annonçant le décès de Massimo Morsello. Je suis resté bouche bée. A l’autre bout de la ligne, Rainaldo Graziani me demandait, préoccupé, si j’étais encore là.
Je connaissais Massimo depuis toujours.
Enfin je l’ai connu quand j’ai commencé à militer au Fronte delle gioventù à Acca Larenzia. Sa musique et ses paroles si tranchantes nous accompagnaient les soirs de collages ou pendant la préparation des tracts ou des bannières dans cette petite pièce humide et fraiche au sous-sol du local.
Je me rappelle acheter sa cassette au cinéma Adrianno pendant un meeting électoral de Pino Rauti pour le vieux MSI. A l’entrée se trouvait un gars à la tête sympathique qui se nommait Alberto, que j’ai ensuite mieux connu. Il avait une table et vendait des cassettes à la couverture rouge et un dessin à l’encre de chine. Le dessin représentait une main géante qui écrasait contre un mur un policier, un juge et un journaliste. Sur l’avant-bras, on pouvait lire INTOLLERANZA et dessous MASSIMO MORSELLO. Si aujourd’hui les cassettes font parties du passé, celle-ci je la conserve précieusement car elle me rappelle de nombreux souvenirs et de sensations uniques liées à mes débuts en politique.
De l’achat de cette cassette au coup de fil au cœur de la nuit, dix ans s’étaient écoulés. J’ai eu l’occasion de connaître Massimino à Londres et de lui parler… trois ou quatre fois dans diverses occasions. Massimo combattait déjà contre la maladie et marchait avec une canne mais ses yeux vifs et souriants semblaient toujours dire « Regarde je vais bien, c’est juste une blague »… cela aussi, pour moi, ce fut Massimo.
En plus de sa profondeur de combattant, la dignité face à l’exil ou la poésie contenue dans ses chansons, Massimo était une personnalité joyeuse et joueuse. Il riait sous sa moustache et ses yeux parlaient plus que les mots quand on le voyait. C’était le cas quand j’ai eu l’honneur de faire un concert avec lui, avec Zetazeroalfa et Aurora à Milan. Le silence dans la salle quand il est monté sur scène était irréel. Il y avait de la magie dans l’air, je m’en rappelle avec émotion, une magie qui unissait un public d’âges, de groupes et de classes sociales variés. Chacun avait été kidnappé par sa personnalité et sa musique. Même quand il se taisait sur scène tout le monde était comme enchanté car la magie qui s’opère dans ces circonstances s’apparente à un amour pur. Massimo représente une génération qui fut persécutée et assassinée. Il représentait notre monde qui avait été choisi par d’autres comme bouc-émissaire. Non seulement il y survécut mais il avait encore quelque chose à dire et à donner comme un pied-de-nez au destin.
Sa mélancolie était aussi la notre. Ses défis étaient aussi nos défis. Nous aussi, du haut de nos dix-huit ans, nous vivions cet exil, un exil spirituel. Exilé dans notre propre pays, en guerre contre tous.
Tant de fois j’ai eu l’occasion de chanter ses chansons... Figli di una frontiera, Intolleranza (sa plus belle chanson selon moi), I nostri canti assassini, I miei amici…
Et voilà dix autres années sont passées depuis ce coup de fil dramatique et je me rends compte que la figure de référence qu’était Massimo nous manque. Si belle, si authentique.
 
Gianluca Iannone (Zetazeroalfa) 

Aucun commentaire: